Vald, les clés du succès

Valentin Le Du, A.K.A Vald, est le patronyme d'un artiste de la scène rap française qu'il n'est aujourd'hui plus possible de rater. Parfois bouffon, parfois sérieux, toujours pertinent dans ses punchlines, le rappeur d'Aulnay-Sous-Bois est bien souvent difficile à cerner, que ce soit pour le public ou la presse spécialisée. Toutefois, personne ne peut lui enlever la hype qu'il a réussi à conquérir ces cinq dernières années. Retour sur les raisons d'un succès commercial confirmé.
Une promotion inédite
Si elle reprend en premier lieu certains des codes établis par les promotions d'Agartha et de XEU, comme le teasing via des posts énigmatiques, des visuels d'album dévoilés au compte-goutte et de faux leaks, la promotion de la cuvée 2019 de Vald est tout de même unique. Ce monde est cruel a en effet vu son visuel projeté dans certaines villes à l'étranger : Tokyo, New York ou encore Abu-Dhabi ont ainsi pu profiter pendant quelques heures du visage du rappeur plongé dans l'eau.
Cette première partie, malgré qu'elle soit risquée au vu des sommes engagées, a réellement fonctionné : V.A.L.D. s'est ainsi fendu d'un tweet, le 20 septembre, annonçant la précommande de 12.000 albums, chaque édition étant éditée à 3.000 exemplaires seulement.
En parallèle, le rappeur d'Aulnay-Sous-Bois a également dévoilé le 27 septembre dernier Journal Perso II, extrait inédit de CMEC : le clip, particulièrement réussi, nous le dévoile plus sérieux qu'à l'accoutumée. Désabusé, les traits tirés, il apparaît au volant d'une Ford Mustang noire avec l'air d'un gangster rappelant la performance de Johnny Depp en James Whitey Bulger dans Strictly Criminal. La mise en scène est maîtrisée, et le message est clair : Vald fait une mise au point sur lui-même et sa carrière, et il n'a besoin de personne pour cela, ce que les trois victimes du clip peuvent confirmer.
Revenons maintenant à la seconde partie de la promotion de l'album, qui débute le jour même de sa sortie officielle : invité de la traditionnelle Planète Rap sur Skyrock durant la semaine du 6 octobre, le rappeur offre des freestyles inédits (battant au passage le record du plus long freestyle réalisé), se prête au jeu de l'interview avec son équipe et livre la tracklist de CMEC. Le jeudi soir à minuit, c'est la sortie officielle de l'album, dans les bacs et en streaming. Dès le lendemain, Sully poursuit son opération marketing en partenariat avec Deezer via 16 hologrammes situés à proximité du MK2 Bibliothèque de Paris, qui interprètent chacun un extrait différent de l'album, et ce jusqu'à minuit. Il n'aura par ailleurs pas manqué de passer voir l'installation et la partager sur Instagram, en rencontrant au passage Le Règlement, dont l'analyse de CMEC vient de sortir.
Un album travaillé
Dans une interview accordée au journal Le Monde à la veille de la sortie de Ce monde est cruel, Vald revient sur l'ad lib "Cet album est un braquage", que l'on peut entendre à plusieurs reprises dans l'album. Pince-sans-rire, le rappeur explique : "Au vu des sommes engagées, j'ai l'impression, en effet, que c'est un braquage. Est-ce que je mérite tout ça ? Des sommes d'argent pareilles ? J'ai peur de faire flipper les lecteurs du Monde et les impôts, mais aujourd'hui ça parle en millions d'euros pour signer un album de Vald... C'est complètement fou."
Et l'on ne peut cacher que l'album en lui-même est vraiment travaillé. Produit dans sa quasi-totalité par Seezy, il mêle influences lo-fi (Poches pleines), rock (NQNTMQMQMB), en passant par des sons plus mélancoliques comme Journal Perso II. Les featurings sont eux aussi de qualité, et l'on retrouve ainsi Suikon Blaz AD, SCH (sur Dernier retrait) et Maes (sur ASB). Mention spéciale à Pension Man, totalement décalé et réellement jouissif de par son concept, qui permet à Vald d'incarner un super-héros permettant à des femmes de percevoir une pension en leur faisant des enfants. En définitive, le message délivré et la technique maîtrisée rendent l'album authentique, à l'image du titre Ignorant.
Un succès escompté
Suite au premier weekend d'exploitation, Vald aura vendu 28.556 albums, réalisant ainsi le second meilleur démarrage de l'année derrière Deux frères de PNL, qui s'était vendu à environ 74.000 unités en midweek. On peut donc spéculer sur l'annonce d'un disque d'or avant la fin du mois, juste récompense pour le travail du rappeur d'Aulnay-Sous-Bois. Il aura ainsi réussi à prouver que l'on peut sortir des sentiers battus pour assurer la promotion et la hype autour d'un album, en rentrant encore un peu plus au Panthéon du rap français.